L'Histoire sur une monnaie : Aurélien et Vabalath
2.63g; 21mm; 12h, RIC 381 (S)
En 244, Gordien III meurt lors d'une campagne contre les Parthes. En Orient c'est la déconfiture. On cherche un défenseur contre la contre-offensive qui pourrait venir de Perse. Un homme fort émerge : Odenath, "roi" de Palmyre.
Philippe l'Arabe confirme Odenath comme leader de l'Orient. En essayant d'éviter la sécession. Odenath est fait vir clarissimus, titre sénatorial. Il devient un notable incontournable de l'Orient.
En 260, c'est la déroute : Valérien est fait prisonnier par Shapur, le sassanide. Gallien est loin. L'Orient a besoin d'un leader. On se retourne vers Odenath.
On le désigne (ou se désigne-t-il?) dux romanorum (commandant des Romains), peut-être même imperator voire auguste. Après quelques campagnes qui calmèrent les sassanides, il se proclame même roi des rois.
S'émancipe-t-il pour autant de Rome? Pas complètement : il frappe monnaie au nom de Gallien depuis les ateliers orientaux.
Il meurt en 267 ou 268, à peu près en même temps que Gallien. La double succession s'organise : Claude II succède à Gallien mais occupé sur le Rhin et le Danube, il est presque soulagé que Palmyre se charge de l'Orient.
En Orient, la succession n'est pas aisée. Mais Vabalath (Vaballathus, Vabalathus, Wahballat) un de ses fils finit pas prendre la succession. Il a 12 ans. C'est donc sa mère, la femme de Vabalath qui assure la régence, la célèbre Zénobie (Septimia Bathzabbai Zénobie), une des plus fascinantes reines de l'Antiquité (lire l'Histoire Auguste! C'est formidable).
En 270, après les brefs règnes de Claude et Quintille, arrive Aurélien. Zénobie espère être confirmée par le pouvoir impérial.
Les monnaies montrent tout ça:
- ici, on a Aurélien (IMP C AVRELIANVS AVG), dans ses titres d'imperator et d'auguste, avec la couronne radiée et la cuirasse (il arrive avec une solide réputation militaire).
- au revers, on a Vabalath (VABALATHVS VC R IM DR) avec les titres de vir clarissimus (hérité de son père, titre sénatorial romain), rex (roi, titre héréditaire de roi de Palmyre), imperator (chef des armées, défenseur de l'Orient) et dux romanorum (commandant des Romains, hérité aussi de son père en tant que leader des forces romaines d'Orient). Il n'est que drapé et couronné de laurier : il la joue modeste, face à Aurélien sur l'autre face.
Zénobie veut montrer l'union nécessaire d'Aurélien et de son fils. Qu'ils forment une équipe. Mais qu'ils reconnaissent la prééminence d'Aurélien, avec modestie.
Cependant, on peut remarquer sous le portrait d'Aurélien un B, la marque d'officine, qui figure normalement au revers : l'avers, la face qui porte le portrait du souverain, c'est son fiston! Aurélien n'est qu'au revers. C'est que la monnaie est frappée à Antioche, sur ses terres, et à seigneur tout honneur. Les ouvrages de références donnent d'habitude Aurélien pour avers et Vabalath pour revers, or c'est indubitablement l'inverse.
Malheureusement, Aurélien est bien décidé à réunifier le monde romain : il met fin aux sécessions, en Gaule (Tétricus) et en Orient (Vabalath).
En 272, il attaque les palmyréens et Zénobie est capturée. Elle est exhibée lors du triomphe d'Aurélien. Puis elle est exilée à Tivoli, sans doute dans la Villa Hadriana. Ça va.
Ces quelques années, autour de Zénobie, auront suffi à faire la légende de Palmyre. Et je sais qu'à Age of Empire j'adorais jouer les Palmyréens.