Les Maison de tolérance
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Les maisons de tolérance, connues également sous les termes de maisons closes ou de bordels, étaient des établissements où la prostitution était exercée dans le cadre d'une réglementation et avec la tolérance des autorités.
Encadrement et Organisation
Dans plusieurs nations, incluant la France, les maisons de tolérance jouissaient de légalité jusqu'à la première moitié du XXème siècle. Leur existence était encadrée par des règles strictes portant sur leur emplacement, leur administration et les normes sanitaires pour les personnes prostituées. Des inspections sanitaires régulières étaient ordonnées par les autorités pour limiter la propagation des infections sexuellement transmissibles.
Les maisons de tolérance étaient fréquemment dirigées par une tenancière ou une "maquerelle". Les travailleuses du sexe y exerçaient sous contrat, versant une commission sur leurs gains à l'établissement. Les clients réglaient généralement à l'entrée ou achetaient des jetons qui servaient de devise à l'intérieur.
Point de vue Historique
En France, les maisons de tolérance étaient largement répandues jusqu'à leur interdiction officielle par la loi Marthe Richard en 1946. Cette législation avait pour objectif de mettre fin à la réglementation de la prostitution en fermant les établissements et en réinsérant les personnes prostituées dans la société.
Dans les territoires coloniaux sous administration française, tel que l'Algérie, les maisons de tolérance étaient également courantes. Elles étaient principalement destinées aux colons européens et aux militaires, tandis que des quartiers distincts étaient réservés pour la prostitution locale. L'administration coloniale appliquait des règles similaires à celles en vigueur dans la métropole pour encadrer ces pratiques.
Point de vue Socioculturel
Les travailleuses du sexe dans les maisons de tolérance étaient fréquemment stigmatisées par la société, et leurs conditions de vie et de travail pouvaient être extrêmement difficiles. Malgré les réglementations en place, elles étaient vulnérables à l'exploitation et à la violence.
Par ailleurs, les maisons de tolérance ont également eu un impact significatif sur la culture populaire, souvent représentées dans la littérature, l'art et les médias comme des lieux associés au vice mais également au glamour. Elles étaient un sujet de fascination et de débat moral.
Aujourd’hui
La clôture des maisons de tolérance en France a engendré une réévaluation des politiques relatives à la prostitution, avec une transition vers des approches soit répressives, soit axées sur la réduction des risques, selon les époques et les contextes politiques.
Aujourd'hui, les maisons de tolérance sont intégrées à l'histoire sociale et culturelle de nombreuses localités. Elles peuvent être redécouvertes à travers des recherches historiques et archéologiques, ou préservées en tant que sites patrimoniaux en raison de leur importance historique et culturelle.
Le Chat Noir d’Alger
Le "Chat Noir" d'Alger, bien que souvent confondu avec d'autres maisons closes célèbres de l'époque coloniale, était en réalité une maison de tolérance parmi les nombreuses qui existaient dans la région. En effet, les maisons closes étaient un élément notable du paysage colonial, notamment à Alger où elles ont été établies très tôt après la conquête française en 1830.
Les maisons de tolérance à Alger faisaient partie d'un système réglementé de prostitution. Dès 1831, un arrêté permit la création d'un statut officiel pour les prostituées et l'organisation de visites sanitaires régulières. Ces établissements étaient souvent destinés aux prostituées européennes venues avec les colons et militaires, tandis que les femmes locales étaient généralement cantonnées dans des quartiers réservés spécifiques.
Parmi les maisons closes les plus célèbres, on trouve "Le Sphynx" d'Alger, souvent considéré comme la plus grande et la plus notoire de toute l'Afrique du Nord. Cette maison close a laissé peu de traces dans les archives administratives et policières, mais elle continue de fasciner par l'imaginaire érotique qu'elle évoque.
Dans les années 1940, les maisons closes telles que celles d'Oran et d'Alger restaient ouvertes même après la fermeture des maisons de tolérance en France métropolitaine en 1946. Ces maisons fonctionnaient sous une surveillance stricte de la police et étaient souvent dirigées par une "maquerelle".
Pour une plongée plus intime dans l'histoire des maisons closes algériennes, un article d'El Watan a documenté l'expérience de la dernière maison de tolérance à Oran, où les pratiques et les histoires de ces lieux continuent de résonner jusqu'à nos jours.
Des Jetons
Les jetons servaient principalement à éviter l'échange direct d'argent entre les clients et les travailleuses. Ces jetons, appelés parfois "monnaies de nécessité", étaient achetés par les clients à l'entrée de l'établissement et ensuite échangés contre des services à l'intérieur.
Les jetons des maisons closes avaient souvent des inscriptions et des gravures spécifiques qui les rendaient uniques à chaque établissement. Par exemple, certains pouvaient porter des messages explicites comme "Bon pour entrer au paradis" ou des noms d'établissements particuliers comme le “Chat Noir d’Alger”. Ces jetons étaient non seulement des moyens de paiement, mais aussi des souvenirs et des objets de collection prisés aujourd'hui par les numismates.
En France, et par extension dans les colonies comme l'Algérie, ces jetons étaient généralement fabriqués en métal et portaient des motifs et des inscriptions qui authentifiaient leur origine. La fermeture des maisons closes en 1946 a rendu ces jetons rares et recherchés, certains pouvant atteindre des prix élevés lors des ventes aux enchères.
Pour plus d'informations sur les jetons de maisons closes et leur utilisation, vous pouvez consulter des forums de numismatique ou des sites spécialisés en ventes aux enchères de pièces de collection.
Et en Asie ?!?
Les jetons utilisés dans les maisons closes, comme ceux du quartier Nam Fong à Tien-Tsin, sont des pièces spécifiques souvent utilisées comme monnaie interne pour payer des services ou des consommations.
Un exemple notable est le jeton de club de Nam Fong. Ces jetons étaient fabriqués en cuivre jaune avec un titre de 900 millièmes et avaient un diamètre de 32 mm. Ils présentaient des caractères chinois avec l'inscription "NAM FONG CLUB" sur les deux faces, signifiant "tourné vers le Sud". Ces jetons étaient utilisés dans des clubs, des maisons de passe, des bars ou des établissements de jeux souvent gérés par des expatriés français d'Indochine
Ces jetons étaient frappés en grande quantité, par exemple, une émission de 2 806 000 exemplaires est documentée, ce qui montre leur usage fréquent et courant dans ces établissements.
Un centre de rééducation pour prostituées dans les locaux d'un ancien bordel à Pékin, 1949.
Ma conclusion
Les maisons closes, bien qu'intégrées au paysage colonial et réglementées pour contrôler la prostitution, ont souvent été des lieux de grande tristesse. Elles étaient caractérisées par l'exploitation et la marginalisation des femmes, qu'elles soient européennes ou locales. Les jetons utilisés pour les transactions illustrent la déshumanisation des relations entre clients et travailleuses. Aujourd'hui, ces jetons sont des objets de collection, rappelant une époque où la dignité des femmes était souvent sacrifiée aux exigences économiques et sociales.
Sources
- Hôtel des Ventes de Monte-Carlo (https://hvmc.com/),
- Article "Visite au Sphynx d'Alger" de Christelle Taraud,
- Réglementarisme colonial. Algérie, Tunisie et Maroc (1830-1962) de Christelle Taraud,
- Le forum https://www.algerie-dz.com/
- The Maisons Closes of Paris: The Dark Side of the City of Light de Pat Hallam
- Dossier prostitution, Long-métrage de Jean-Claude Roy
- La Chaîne Le Stryge : https://www.youtube.com/@lestryge
- Ces maisons closes reconverties qui rouvrent leurs portes à Paris de Challenges.fr par Rodolphe Fouano
- Crime, misère, prostitution : quand la presse plongeait dans les « bas-fonds » de Londres de Pierre Ancery
- « Wentworth Street, à Whitechapel », estampe de Gustave Doré, 1872 - source : Gallica-BnF